LUCIEN SUEL - MORCEAUX CHOISIS
1991
Edition commentée avec Notes, Notices bio-bibliographiques, Jugements, Exercices, et une introduction par MICHEL CHAMPENDAL
avec des illustrations de l’auteur
Quand je ne pense ni à la mort, ni à la stupidité du monde, ni aux pluies acides, je passe un doigt mouillé sur les filles de papier. Je suis un humaniste...
Lucien Suel
TABLE DES MATIERES
NOTICE
LUCIEN SUEL, UN CONTEMPORAIN
par Michel Champendal
Introduction
Dix éléments de réflexion pour mieux aborder Lucien Suel
et son œuvre
Repèresbiographiques
Bibliographies
SOMBRE DUCASSE
EROSTATIQUE DES UTILITES
DERNIERE CHARRETTE AVANT L’ECHAFAUD
MOTEUR : EPOUILLAGE (1) (extrait
MOTEUR : EPOUILLAGE (2
RAVALEMENTS
ETERNELLE RAFALE
MEMENTO MATAMORE
LE MASTABA D’AUGUSTIN LESAGE
STATIONS
SANS ESPOIR DE RETOUR DU COURRIER
POEMES ?
ELLES SUENT, AINSI LUES
POEME OU PAPOU
MA. 26 & MA. 14
TRAIN DE VIE
COLONNES DENUDEES
EBRANLEMENT PNEUMATIQUE
LITANIES DU TOMBEAU DE MOUCHETTE
PROSE ?
... VERSIONS
PROSE DU VER
MELANGES
LE LAPIN MYSTIQUE
FAUSSE DONNE (scénario
CHRONIQUES
ENTRETIEN
NOTICE (suite)
Dix exercices pratiques, par Michel Champendal
Jugements des contemporains
Table des Matières
EROSTATIQUE DES UTILITES (1)
Le grand pardon blessé par tes cris : passoire insensée du grand vide établi
Car tu rayonnes, Eve crépusculaire et partisane
Femmes, reines extasiées, éperonnées de la Justice repue, et triste, et primitive.
Et seule, la grande Pythie sagace des folles inventions est constante dans l’incompréhension. Baroque, ô mon frère, élève la coupe du gratin enflé de liberté par la gueuserie universelle.
Etonnez-vous, forêts sans dimension; rivières embaumées et toi, pleure liberté déçue par les états enflés de domination.(3)
Evasions, déchaînez-vous, car le traumatisme cravaché du passé relève sa tête hideuse sur les épaules de son erreur affamée.
(1) Publié en 1967 dans le N°2 de la revue LA RIGUINGUETTE (Arras).
(2) Poème de jeunesse ; l’auteur a écrit ce texte en 1964 alors qu’il était en classe de première à l’Ecole Normale de Garçons d’Arras. Il découvrait alors les poètes surréalistes et l’écriture automatique.
(3) Allusion à l’Anarchie. Lors de la première publication, ce texte était dédié à Max Stirner. (
MOTEUR : EPOUILLAGE (1) (1)
(extrait)
Debout, les morts!
Dernières Nouvelles de Pataugas-City(2) / de notre agence de l’attire-menthe / Cx / 23 / OY / AH / 23(3) / Faisant siennes les vues de M. Mouzéro cnt économies d’énergie réalisables / Rédacteur en chef D.O.R.G.(4) décide surseoir fabrication journal de papiers(5) / Proximité future centrale nucléaire mortelle infra-rouge Gravelines / moins de 50 km presses Pataugas-City / Réacteur en Chef préoccupé par propre survie et sienne famille de bouseux psychédéliques / aménageons immense cave air-conditioned sous collines d’Artois Calcaire / Stop
Quand les centrales mortelles infra-rouges inonderont ce beau pays de leurs radiations invisibles mais dangereuses (rien à voir avec D. Or. - Radiation Orgonomique de Mort - R. Om.)(6) , nous serons à même de diffuser les Ultimes Nouvelles de Pataugas-City au peuple des Prévoyantes Taupes. Magnétophone : le mot de la fin selon G.C.(7) : que dalle! la fin du mot selon les exégètes de B.W.(8) ; c’était con/troll. Petite photocopie d’un “voyage”(9) surprenant à bien des égards. A l’écoute de Radio-Varsovie, nous vivons dans un monde... “Baby, you can drive my car.” (10) A tout hasard, écoutez la voix de Assène y s’abat : “This is war to extermination”.(11)
Towers...............Open........................Fire.............(12)
Si, sur un champ betteravier fraîchement levé, on pulvérise un peu de poudre Akdeniz (13) (copyright C. Galata), eh bien, messieurs-dames, voilà! les jeunes pousses par un effet de euh, mutation, quasiment, pardon, incroyable se métamorphosent : la feuille simple devient composée à plusieurs (cinq à sept) folioles carabinés, euh, cannabinés. Imaginez les burp conséquences de l’effet C.G. sur l’industrie sucrière, le saccharose maintenant enveloppé dans du buvard quadrillé, vraiment coule...
ô ô ô ô ô ô
Vol de nuit
en jaillissements spermiques
stéréoboscopiques
LE MONSTRE EN MANTEAU DE FOURRURE(14)
avec les talismans photojaunis de Mère
à la main devant les glaces
(Miroirs dévorants)
la parurepute flottante
mes cheveux verts poudrulents
se sont dressés
ET JE ME SUIS
ENFUI
Le chemin s’ouvre derrière
les diapositives amateurs.
Ceci n’est pas de la rigolade.
Seul pour exister tous hommes morts écrasés sous des baignoires, ne se logeant que comme des palmipèdes d’une espèce rare...
Pour retrouver le Verbe, Ironique,
sur ta sainte face(15) cherche
et ne me retrouve pas.
Je ne sais plus attendre. Mes vêtements sombres sombrent tandis que sonnent dans les broussailles orangées l’armure des longues pattes araignées tarentules et pourquoi pas centipèdes. Les enfants cherchent une raison à leurs pleurs comme jadis ceux à qui le poète tint un beau discours de grande personne au fleuve qui s’échappe de leurs yeux rougis et crevés des abstractions hideuses arrachent des larmes de sel brûlant.
Fondu.
le rythme arraché des bêtes des moteurs des ailes d’oiseaux pèse sur les doigts ta liberté de compter les moutons grimpés sur tes larges épaules.
il y a des silences............silences.........silences............
il n’est pas un amuseur/bonimenteur.............................
aux dictionnaires pour vérifier l’étymologie du verbe amuser.....
amuser
A MUSEE
âme usée
Livres envahis par les interférences-commentaires de texte (parasites). Je n’ai rien à dire à propos de lui.
J’ai détruit une platine stéréo pour me fabriquer une machine à rêver surmontée d’un baril de persil ajouré. Et ça marche.(16)
(1) Publié en juin 1979 dans le n°1 de la revue LE POINT DES INDICES sous le titre “Moteur : Delousing, Journal de Voyage 1958-1978”, avec une dédicace à Claude Pélieu-Washburn (G. Humbert éd.). Repris dans Sombre Ducasse op. cit.
(2) Pataugas était le surnom que les gens de la campagne donnaient aux écologistes venant de la ville (du nom d’une marque de chaussures de marche).
(3) 23 est le nombre des paires de chromosomes dans les cellules humaines. C’est un nombre fétiche, très présent dans l’œuvre de W. Burroughs.
(4) D.O.R.G. : Demain On Rasera Gratis. Voir page 36.
(5) Tirmande Blues, journal underground dont un seul numéro fut imprimé en mai 1975 à La Tirmande (Pas-de-Calais).
(6) Allusion aux travaux de Wilhelm Reich sur l’énergie d’orgone.
(7) Gregory Corso, poète beatnik, cité par Emmett Grogan, dans “Ringolevio”, Flammarion, 1973.
(8) Burroughs William, écrivain américain né à Saint-Louis (Missouri) en 1914.
(9) Voir Entretien avec l’auteur.
(10) Chanson des Beatles.
(11) Phrase extraite de “Nova Express”, in CAHIERS DE L’HERNE, Burroughs, Pélieu, Kaufmann, 1967.
(12) Extrait de “Nova Express”, op.cit.
(13) Mer Noire, en turc.
(14) Voir Entretien avec l’auteur.
(15) Allusion à la légende de Sainte Véronique, à rapprocher des mots précédents (Verbe, ironique).
(16) La “Dream Machine” inventée par Ian Sommerville et Brion Gysin, expérimentée par W. Burroughs et B. Gysin, est basée sur l’effet de clignotement de la lumière sur les paupières fermées. Cf. Brion Gysin Let The Mice In , by B. Gysin, Something Else Press, Inc. 1973.
ETERNELLE RAFALE (1)
Quand je plonge les yeux dans ceux du ciel, je ne pense jamais à huer la théière du jardin synthétique à découvert sur le sable dada encagé dans la presse. Les damnés boivent l’apéro au Ministère de la Vérité. L’emballage n’est plus ma tasse de lait depuis mon retour de la route étoilée. Les mailles filées de mes auto-collants ont achevé l’espoir. Dans les dictionnaires, les germes infectieux se jouent des sonates à répétition en blasphémant la grâce des photocopieuses. Des tampons se dessèchent sur les murs sacrifiés. L’astrologue déchiffre l’avenir de la poésie dans les boyaux d’un rat monstrueux écrabouillé dans l’onde sale du caniveau, putréfié dans sa fourrure crémeuse.
Marchand du Sel reçut le faire-part de ma venue en ce monde alors qu’il se coupait la chevelure en star anthologique.(2) Le calendrier des fêtes votives était un ready-made dédié à la pipelette paléolithique. Je suis donc né, et cette année-là, Kurt Schwitters(3) me précéda dans le sous-sol européen. Pour mon premier voyage à Paris, à califourchon sur la chaise, esprit altéré, j’eus quelque difficulté à reconnaître mes absences. Sans les prévenances de l’intendance bottée et porcine qui officiait, ignoble, dans l’abattoir marécageux, je les aurais irrévocablement oubliées au long des caillebotis sanglants sur lesquels les bottes luisantes d’un boucher traçaient des empreintes à relever la glotte. Mes biographies furent donc rédigées par un dément assoiffé d’estime artistique alors qu’il était incapable d’assurer la subsistance de sa femme et de dire la palette violente de l’ergastule dans lequel le crédit me forçait à contempler des merveilles funèbres à force d’érubescence ophtalmique. Voici la lumière médicale qui bave avec attendrissement dans l’ignare espace de la rectitude totalisante et toxique. Au seuil de l’hôpital, au porche de l’étable, aux entrées des supermarchés de la fibre rose, les envoyés spéciaux piétinent car les bas morceaux sont conservés là où l’oeil humain est inutilisable. L’experte du gros orteil pousse du pied l’alcoolique romantique qui a confondu la conscription et l’aube aux phalanges meurtries. L’écho du halètement physiologique se répand dans les canaux télépathiques. Une ballerine décalquée dans le vinyle se prend les pieds dans les tas de fariboles postmodernes déposées là par un éboueur conservateur.
Or, ô pied des poteaux téléphoniques, je tends l’oreille et les muscles par dédain de saisir la difficulté des notations guerrières. Par delà les vagues gouvernementales : amours à connaître, travail de la destinée, connaissance des sources vitales y borborygmant la souffrance, je fus la victime pascale aux mains sales de ces jours pendant lesquels leur impureté me valut l’étroite parade de la bêtise placide. L’impureté a pris ventre au verso des cartes de géographie recyclées dans les murs masqués du palais temporel. Le cri victorieux de l’écriture me pompa, me déchira, me phagocyta. L’espace périodique entraîna mes soupirs au ciel de lit documentaire, balbutia mes confettis au front fantastique du temple ongulaire, régurgita mes assemblages d’ordures dans le noir bassin de la décantation finale et parfumée. L’homme au sapin blanchi éparpille ses aiguillées opiacées, popularise ses fèces fouettées par la pluie nucléaire. Les métronomes souterrains rythment l’érosion des blancheurs callypiges. C’est ainsi et c’est un si vieux jugement dans les circonvolutions cérébrales que les chaînes axonales en deviennent dendrophages pour la jouissance du dactylographe au clavier à traiter les ordonnances du contrôle fatal.
L’absorption de toute la force née du travail de la population adulte est la limite supérieure naturelle de l’exploitation du sol alors que la satisfaction des besoins-navets de la consommation selon l’échelle de l’hygiène normale devait avoir l’intention de rejoindre la limite inférieure(4) . Les percussionnistes à peau ne falsifient presque pas les chemins qui mènent à la compassion larmoyante. Partout les décisions, les trains, les armes blanches, la vertu se prennent par la tête. Les gens de problèmes envahissent vite la page. Ils mûrissent la trahison et la perfidie. Leur intelligence, leurs aspirations sont opaques car la convivialité suppose que l’on a opéré l’industrie du mieux.
Ce fut à Delft, en l’année 1677, qu’un M. Antonie Van Leeuwenhoek admira sur une plaque de microscope, pour une première fois dans ce monde un jet de spermatozoïdes humains. Ceci ne peut être mis en doute. La vision, inattendue de cet échafaudage, lui fit gonfler le ballon du savoir et entraîna un saut qualitatif du vif alors que le hasard perdait son dû et sa faculté d’amener la chute de l’arbre du rien et du râle. Aucune œuvre d’art ne pourrait à compter de cet instant soutenir la maladie de la destruction. Les œufs suent dans la machinerie formidable d’un labyrinthe lumineux. L’homme isole son corps dans la jeunesse glabre. La marche pesante d’un lourd bovin écorché par l’acier glacé retentit onctueusement dans la chapelle des crânes déçus. Qui peut compter sur la générosité de la société? Quel désir engendrera sa tolérance? De quelle console dirige-t-on le vide béant qui engloutit les dents, les poils, la peau, l’urine et le sang des prostituées obèses lorsque les moiteurs citadines ont altéré leur identité sociale? La célébrité se négocie dans les berlingots pleins de shampooing à la devanture naïve d’un libraire. Les chimpanzés sont payés pour enquêter sur la mort de la pensée occidentale. Qui parle? La bonne vieille ironie se goberge dans les salles d’attente du monde cathodique. Le jugement sera rendu sur les bords d’un lavabo émaillé, parmi les caillots rosés ramoneurs d’un œsophage ascensionnel, huilé par les frites à moitié mastiquées et le muscle de bovidé pré-digéré, alors que les trompettes dernières ne sonneront que pour ajouter leur alarme aux battements sourds de ma tête chercheuse. La cruauté de ces artifices ne devrait pas faire cas de cette mystification universelle et illusoire.
L’oreille collée aux vitres, je respire l’odeur oxalée, je renifle le lait euphorbien, lui tend l’irréalité de mon désir. Tel principe de la cécité intérieure(5) y obéit au prorata des navets d’ivre dans la soupe de l’immortalité. Je ne tiens pas à laver itérativement le cul de la bêtise, la crue de la maîtrise, le brou de la noire face sur le suaire de coton synthétique sans repassage. Ethique sainte sur l’enceinte étique de mon péritoine distendu par la lipidité sexuelle. Mes mots facilitent le passage des terreurs nocturnes. Ils présentent le symptôme au bourreau, la raison aux barreaux, l’esclave au bureau. L’électricité torve troue le sang. Mes mots pistent un succès concret dans le vase de l’expansion civile de la culture des crucifères.
Tout absolu a liquéfié sa permanence. A mesure que le grain enfle, la peur pourrit dans la terre empurinée de ma nativité ancillaire. J’éructe à contre-courant et le vent me rabat l’immondice entre les cuisses, sur la bavette de mon caleçon de coton gris. Un véritable orgasme au sein du brouillard, au ralenti des pots d’échappement. Les explorateurs de la fourche fémorale se battent sur le front des odeurs, s’acharnent à dynamiter la marmelade exotérique. L’humanité est une histoire close, un musée arachnoïde. Les convertis minables l’ont voulue ainsi. L’eau bouillante soulève le couvercle de ma lessiveuse. Là-dessous, dans la bienveillance bleutée du savonnage salivaire, mes sous-vêtements vont se tordre, se sanctifier, tribades noyées de vapeur. Noli me tangere.(6)
(1) Publié en octobre 1987 dans la collection PLIS (Le Dépli Amoureux, éd.).
(2) Marcel Duchamp s’était fait faire une tonsure en forme d’étoile (photo Man Ray).
(3) Kurt Schwitters, peintre, sculpteur et poète allemand, est mort en 1948.
(4) Paraphrase de la doctrine économique de Victor Tchernov, Socialiste Révolutionnaire russe contraint à l’exil par les Bolcheviks en 1920.
(5) Cf. Kandinsky
(6) “Ne me touche pas”, parole du Christ à Marie-Madeleine, après sa sortie du tombeau. (Jean 20-17).
LE MASTABA D’AUGUSTIN LESAGE
(extraits)
un
coup
pourri
pour oui
un coup de
reins pour y
frapper le oui
un coup pour o ui
deux coups pour le
nom ouï Marie( 3) guérie
deux coups pour don du
ciel Marie Marius (4) frappe
un coup pour oui deux fous
pour noms de Tyane le crayon
voyage dans l’espace blanc oui
non oui non système binaire béni
d’ une informatique funèbre oui oui
POEME OU PAPOU (1)
tôt ou tard
le bout t’aim’mon gars
tôt ou tard
l’atout s’ barre
le gratin du bateau s’ teinte au bout du mât
boul’ qui t’abat le totem
où ta boue gâte le bagout de l’autel
le hangar où le loup joue et loue
la tôl’ des morues
au ras de l’amour
au rat d’eau du gras tas de balourds
dedans la boue du patin de thème
de l’auto-topologique
car thot t’aim’ debout
ou t’abat tôt le dard dur à boules
bout à bout
le tabou
le gâteau
t’aim’ le brou
le tabac
les cadeaux
le tas d’ boue tôt t’aime
ou du sale bout de ta gadoue
tagada
sème le larron
boute au gala le lardon
le trop de son bout à thème
la peau du boubou
au bout du tapis
tata gât’ le tout du bas
d’où t’aime le tas qui boule
qui s’éboule en trop
au trot du ragoût de rat d’égout
qui déroul’ son bas en bas
au thé-moutarde sur l’art
mais toto t’es mou
ta bouche chérie
me touche la mouche
par où t’aime l’état de butor
du moutard de l’aine
à tâtons
ton bouc tue le thon
ton tonton tiss’ ton boubou
ton trois-quarts de bout
bout du mitron sur le tard
sur le totem où t’as bu au bar
tes bouts d’sous sur le compt’tare
tes compt’s sous l’carbure
bouc de ta bure autour de tes mots
tels des embouts de sabots
au bec des aoûtats dans trop d’eau
t’aurais beau t’ôter
mêm’ le goût du pot
mêm’ la peau de crème
mêm’ l’épée du loup
au lourd tabouret du cupidon
d’aine à la coupe au lait doux
qui bout à bout
se boute à tes mots
sans les poux mystiques(2)
qui mastiquent ton appeau
aiment les mots dits(3)
le premier pas pour en rire
bout à bout
le papou parie
bout à bout
le papa pourrit
bout d’abîme
le poèm’ tarit
bout d’abysse
le poèt’ tamise
le tabou t’habite
le totem t’entube(4)
(1) Juillet 1989. Inédit (à paraître dans MAISON ATRIDES & Co).
(2) Cf. Sainte Thérèse d’Avila.
(3) Fritz Lang.
(4) Sigmund Freud.
JUGEMENTS DES CONTEMPORAINS
Sombre Ducasse est un grand texte, mélange de kermesse du Nord et de fidélité à Isidore, avec cette dynamique qui anime tout ce que je connais de Lucien Suel, cette profusion, ce délire verbal...
Gilbert Humbert
Je viens de m’envoyer d’une traite Sombre Ducasse , et j’en ai encore du chantonnement dans les rotules : la synovie qui frémit, faut croire... (...) “Dressant le raide amour avec le fil du vent” : un des plus beaux alexandrins qui ait tricoté mon nerf optique ! Et puis tout le restant... Oui, Sombre Ducasse est une grande et belle chose.
Ivar Ch’Vavar
Sombre Ducasse trop physique pour les pouacres et les pleutres, les bouffres & les piffres.
Francis Giraudet
La Sombre Ducasse de la Station Underground d’Emerveillement Littéraire m’apporte du soleil. J’en ai besoin, ici, comme à Guarbecque, c’est pas chaud.
Gaston Criel
Lucien Suel nous paraît proche de Pélieu : rock, acide, magnétophone, cut-up, mélanges concoctés ou automatiques.
Robert Sabatier
Par bien des côtés, le travail de Suel nous est [à TXT] proche, en particulier, cette sorte de désinvolture gaie avec la langue, qui arrive à noter le décor moderne et son éparpillement.
Christian Prigent
[Eternelle Rafale ] C’est écrit superbement. Un rien sentencieux, à peine surréaliste... Ça s’arrête, parce qu’il n’y a plus de page au recueil mais ça pourrait durer un bottin. (...) L’œil tourne les lignes. Enivré. Sans fin. Le souffle court. La rafale éternelle.
Jacques Morin
[Poèmes ] Dix poèmes où, conféré par la métrique rigoureuse du poème en colonne, le hasard qui, “enduit de gras mou” prévaut comme instance de pénétration, va remonter - colonne, colon, boyau, intestin - à la synchronie fantastique du signifiant. Hasard non sans nécessité donc : la poétique de Lucien Suel m’apparaît de plus en plus comme étant une poétique de l’organique.
Guy Ferdinande
(...) MOUE DE VEAU, revue de haulte graisse & de haute gratuité, avec des n° spéciaux, même, & tout ; ce n’est pas une revuede mail-art (cette contradiction dans les termes), c’est du mail-art en revue.
Jean-Pierre Bobillot
Suel produit des moues à une allure stakhanoviste. Portraits en pied(s) est excellent. Ces moues sont destuyaux. Suel a une manière de recycler les déchets (ou les déchets par anticipation) qui me ravit. Je distribue cesmoues dans la rue, au bureau. On me traite de vicieux.
Christophe Petchanatz
Suel is really the most outstanding kulchur screwer since Vercingétorix.
Carl Weissner.
Le "Mastaba d’Augustin Lesage", insurmontable, mot-nu-men-tal. Un tour de force lexical, une prouesse émotionnelle, une sortie au jour, tout ce que vous voudrez. Le tremblement est là. De mémoire de jardinier c’est ce que j’appelle sans tarder un phénomène futur.
(...)
Les textes de Lucien Suel sont zébrés de grands 8. Je les traverse comme un lupanark, j’y chasse le snark. Je vois la flamme verte de la lanterne rouge & j’entre sans frapper. Je suis ici chez moi. C’est froid & sombre. Il atteste l’exactitude des faits & gestes qu’il rapporte & avance. Ce qui en ressort : l’obscurité où celui qui lit se trouve. Noirceur à l’air libre & aux contours nets. La nuit où tout saigne. Que ses ellipses mettent à l’index & incarcèrent en des sentences justes & cruelles, incurables. C’est une liquidation éclair, une radiation lapidaire des affaires courantes.
Thierry Dessolas
La polyvalence et la polygraphie de son art poétique (cf. le Mastaba d’Augustin Lesage) me laissent assez admirateur.
Jacques Lucchesi